22 août 2009

LIVRES : INTERVIEW DE JEAN - PIERRE PETIT - OVNI LE MESSAGE

Interview de Jean-Pierre Petit



Jean Pierre Petit, vous venez de publier à compte d'auteur un livre intitulé OVNI le message. Pouvez-vous nous dire dans un premier temps quel est le but d'un tel livre?

J.P.P : Le but se lit dans le titre. Après de longues années, je crois avoir compris le sens de ces visites. J'avais déjà exposé cette thèse depuis quatre ans, dans mon site, sans que cela suscite beaucoup d'écho. J'ai alors tenté d'inscrire cela dans un livre, et c'est hélas la même chose. Un de mes collaborateurs m'a dit que l'idée, pourtant simple et compréhensible par le premier venu, était peut être trop en avance, et trop dérangeante pour être entendue. Possible...


Ce qui me surprend le plus à la lecture de votre ouvrage, c'est votre pessimisme (ou réalisme), qui s'explique par le peu d'intérêt que suscite le phénomène OVNI dans la population en général et la communauté scientifique en particulier. Comment expliquez -vous ce recul dans la conscience des gens ?

J.P.P : Il y avait un intérêt très vif dans la population, au milieu des années soixante-dix, qui a amené le CNES à créer le GEPAN, pour répondre à cet intérêt populaire. Je pense que cet intérêt était de nature anecdotique, avait pour mobile la simple curiosité, l'aspect "magazine ". Avec le temps le phénomène OVNI s'est signalé par sa répétitivité, sa monotonie. Lueurs, galipettes, disparitions rapides, etc. Je pense que les gens se sont lassés, tout simplement. Il faut dire que tout a été fait pour engendrer cette lassitude. Le sujet a été folklorisé, discrédité dans maints médias pendant trente années. Le retour en arrière semble impossible.


Au sein de cette communauté scientifique, vous démontrez dans votre livre, que c'est l'ego qui est la cause principale de ce rejet. Pourtant, est-ce que ce n'est pas justement le travail d'un scientifique d'être ouvert à toutes les hypothèses ?

J.P.P : Vous vous faites une image très idéalisée de ce que sont en vérité les scientifiques. Ce sont des gens ordinaires. La science n'est qu'un système organisé de croyances. Elle est en fait structurée comme une religion, si vous la décortiquez un peu. Et de fait, elle possède la même rigidité dogmatique qu'une religion. Elle a ses prêtres, ses rituels, ses fantasmes (les supercordes... l'énergie noire etc...).

Le professeur Michel Bounias

Vous parlez du Professeur Michel Bounias qui est le parfait exemple de ce rejet catégorique que suscite le phénomène OVNI chez les tenanciers du dogme scientifique. Pour les gens qui ne le sauraient pas, pouvez-vous nous rappeler quelle était son rôle dans l'affaire de Trans-en-Provence ? Quelles furent les suites pour lui ?

J.P.P : Le cas de Trans-en-Provence est unique en son genre. Il a été le produit de tout un concours de circonstances. A l'époque, 1981, le responsable du GEPAN de l'époque, le polytechnicien Alain Esterle, avait édicté une conduite à tenir en cas d'atterrissage allégué. Il devait devait y avoir plusieurs témoins et l'enquête ne serait pas poussée plus loin s'il ... avait plu.

Ces règles sont le fait d'un homme incompétent, pas à sa place dans ce genre de chose, comme tous ceux qui se sont succédé à ce poste, à ce jour. Il se trouve qu'à Trans, il y avait un témoin unique : Renato Nicolai et que la veille il y avait eu une forte pluie. Le gendarme qui a fait l'enquête sur le terrain a eu l'idée de recueillir des plantes, de simples luzernes, à l'intérieur d'une trace bien visible, et en dehors de celle-ci. Seconde chance insigne : Il n'a pas coupé les tiges, pour les mettre dans "des sacs plastiques étanches", comme le firent ses collègues un an plus tard lors de l'affaire dite "de l'Amarante" (qui fut ainsi un ratage complet). Il a ramassé une pleine pelletée de terre, supportant ces plantes et a mis le tout dans une boite à chaussures. Ces échantillons ont été acheminés jusqu'au CNES de Toulouse. Comme il avait beaucoup plu, la terre humide a empêché les plantes de dépérir, entre le moment où se sont effectuée cette collecte et celui où, 21 jours plus tard, elles sont arrivées sur la paillasse du professeur Michel Bounias, chercheur à l'INRA d'Avignon (Institut National de Recherche en Agronomie).

Troisième coup de chance : Il se trouve que Bounias avait fait sa thèse sur l'effet de radiations sur les plantes. Effets qu'il mesurait en effectuant un dosage des pigments par une méthode appelée chromatographie sur couches minces.

Bounias a constaté des différences très sensibles entre les deux échantillons, vis-à-vis des équipements pigmentaires des plantes (Chlorophylles A et B, carotène, phéphytine, etc...). Intrigué, il a demandé à ce que des prélèvements soient faits, tous les mètres, jusqu'à une distance de dix mètres du centre de la trace. Il a alors constaté que la perturbation évoluait de manière extrêmement régulière en fonction de la distance et que le coefficient de corrélation, vis-à-vis d'un phénomène en 1/r2 (radiatif), était très élevé (0,99). Il en déduit que les effets constatés devaient être causé par un phénomène de type radiatif. Il en a rendu compte, en précisant qu'il ne voyait nul effecteur capable de produire une telle chose. Des essais d'explications basés sur des projections de ciment s'avérèrent vains. Ce qui est curieux c'est que ce furent les ufologues qui se montrèrent les plus acharnés à démonter cette affaire.

Bounias s'exprima librement dans les médias, mais il se borna à dire ce qu'il avait constaté. C'était un homme ouvert, un authentique scientifique. Mais c'était déjà bien au delà de ce qui pouvait être toléré. En faisant cela, Bounias montrait qu'il pouvait y avoir une donnée factuelle, objective, scientifiquement exploitable, liée au phénomène ovni, autre qu'un témoignage humain, lequel pouvait toujours être soumis à caution. La réaction ne se fit pas attendre : Peu de temps après sa hiérarchie le priva de crédits, de personnel, de locaux, et il se retrouva " déporté " , seul dans un bureau de l'Université d'Avignon, où il finit misérablement sa carrière, privé de tous moyens de recherche. Ajoutons au passage qu'il fut un des tous premiers à signaler la toxicité des pesticides et leurs effets dévastateurs sur les populations d'abeilles (dans l'indifférence la plus totale).


Pour vous, les organismes "de recherches" officielles sur les OVNI en France sont devenus je cite : " Un lieu de transit pour préretraités ". Que pensez-vous des positions de Jean-Jacques Vélasco, concernant le phénomène OVNI, depuis qu'il est détaché du CNES ?

J.P.P : Jean-Jacques Vélasco, simple technicien en optique, se retrouva propulsé à la tête du GEPAN, devenu le SEPRA, lorsque son patron, Alain Esterle, fut envoyé dans un placard, à la suite de l'échec cuisant de celui-ci, de tenter de développer, sans moi, au Centre d'Etudes et de Recherches Technique de Toulouse (CERT), sur des fonds propres importants dont disposait le GEPAN, un thème de recherche en MHD que j'avais proposé. Le scandale fut étouffé. Vélasco, dans son livre évoque la visite d'un haut personnage (en l'occurrence René Pellat, décédé, envoyé sur place par le directeur du CNES de l'Epoque, Hubert Curien, également décédé) qui rendit visite à Esterle et lui signifia qu'il devait démissionner. Ce scandale entraîna la disparition du GEPAN, qui jusque-là avait le statut d'un ... département du CNES !

La trajectoire de Vélasco est à la hauteur de son peu de compétence en matière de science. Mal à l'aise, très bridé par sa hiérarchie du CNES, il joua longtemps le jeu qu'on lui demanda de jouer : désinformer. Ainsi, lors d'une émission enregistrée avec les frères Bogdanoff il y a une vingtaine d'années, on l'entendit dire que " seulement quelques pour cent des témoignages restaient non élucidés, mais qu'avec le temps ce reliquat finirait par disparaître ". Je serais très heureux que quelqu'un retrouve cette interview et la mette en ligne.

Il a en outre " deux cadavres dans ses placards ".

Le premier est un procès en diffamation qu'il intenta à l'ufologue marseillais Robert Alessandri, qui avait découvert, des années plus tard, son incompétence flagrante en matière " d'expertise de phénomènes de rentrées atmosphériques ". Le SEPRA était en effet " le Service d'Expertise des Phénomènes de Rentrées Atmosphériques ". Analysant la rentrée atmosphérique d'un étage de fusée russe Ghorizont, qui s'était produit le 5 novembre 1990, et en se basant sur les trois dernières données de survol fournies par la NASA, il fit une erreur de... 200 km. Vraisemblablement parce que ses moyens d'analyse se limitaient à une mappemonde et une ficelle. Alessandri montra cette erreur, en utilisant un logiciel freeware d'orbitographie, et titra, dans une minuscule revue ufologique qu'il produisait " Quand le CNES engage des fumistes ". Vélasco l'attaqua, et le fit lourdement condamner pour diffamation (5000 Euros). Il eut gain de cause et empocha l'argent sans le moindre état d'âme, somme que je pus collecter auprès de mes lecteurs, Alessandri n'était qu'un pauvre diable. En faisant saisir son compte par huissier, Vélasco n'y trouva pas grand chose.
Par la suite le CNES, craignant que le public ne découvre le caractère complètement bidon de ce service, le SEPRA, le rebaptisa " Service d'Expertise des Phénomènes Rares Aérospatiaux ", qui aurait dû alors s'appeler le .. SEPAR.

Le second est moins connu. Le journaliste aéronautique Robert Roussel fréquenta longtemps le Sepra, à Toulouse. Puis il rédigea un ouvrage dont il envoya copie à Vélasco. Celui-ci, incapable d'écrire une ligne (l'ouvrage suivant qu'il a publié, a été écrit par un "nègre", le journaliste Nicolas Monteggiani), s'associa avec le journaliste Jean-Claude Bourret, grand money-maker en matière d'ovnis, et ils publièrent ensemble un ouvrage intitulé " OVNI, la science avance (...)". Estimant que son texte avait été pillé, Roussel attaque les deux pour plagiat, mais Vélasco et Bourret contre-attaquèrent, et eurent gain de cause. Roussel fut très lourdement condamné, à la hauteur "du préjudice social subi par un personnage tel que Bourret ". Roussel fut en fait complètement ruiné et dû même hypothéquer sa maison pour pouvoir payer la somme requise par le tribunal. Une histoire pratiquement inconnue et parfaitement scandaleuse.

Tout cela n'est pas très brillant et est à la hauteur du personnage, pas non plus à sa place dans ce dossier ovni. Ceci étant, les responsables successifs de ce service du CNES furent tous confrontés à des cas si troublants qu'ils ne purent guère éviter l'hypothèse véhiculaire, extraterrestre.

L'année précédent sa retraite, Vélasco tenta de tirer profit en publiant un ouvrage où il priorisait cette hypothèse. Monteggiani lui servit de nègre, à bas prix. Mais la direction du CNES réagit très vivement en relevant aussitôt Vélasco de ses fonctions et en l'affectant à la conduite d'un club de mini-fusées, qui avait été créé au CNES pour accueillir les jeunes. Le peu brillant Patenet prit sa suite, occupant les trois années précédent son départ à la retraite, en décembre 2008, à scanner et à mettre en ligne sur un site les archives du CNES, totalement dépourvues de toute donnée scientifiquement exploitable.

Aujourd'hui, Vélasco est le has been de l'OVNI. Quant à Alain Esterle, nous n'en entendîmes plus jamais parler. Caude Poher, premier responsable du Gepan, publia lors de son départ en retraite un ouvrage intitulé " les Universons, énergie du futur ", complètement rocambolesque, thèse prétendument scientifique qui n'était appuyée que par des "notes internes Cnes".
En trente deux années la nullité scientifique des responsables du GEPAN-SEPRA-GEIPAN fut sans faille, le service n'ayant jamais publié le moindre papier dans une revue à comité de lecture, seulement des "notes techniques", mises en ligne sur un site Internet par Jacques Patenet, dernier responsable, d'une vacuité absolue. Tout porte à croire que le nouveau responsable, l'ingénieur Yves Blanc, ne fera guère d'efforts pour améliorer cette situation.


Ces derniers mois, certains pays comme la France et l'Angleterre par exemple ont mis sur Internet et à la disposition du grand public, un certain nombre de documents concernant des observations d'OVNI. Est-ce que vous pensez que ces " divulgations " sont juste des effets d'annonce ou bien sont-elles très importantes dans la reconnaissance officielle du phénomène ?


J.P.P : Je ne saurais répondre. Toujours est-il que l'impact est quasi nul. Comprenons-nous bien : le seul impact qui pourrait avoir des suites devrait s'opérer au sein du monde scientifique. Or, à de très rares exceptions dont je fais partie, celui-ci est totalement étanche vis-à-vis de ces questions, d'une étanchéité dont le grand public n'a pas la moindre idée. Au point que quand je disparaîtrai (j'ai 72 ans) toute recherche (à ciel ouvert) d'un niveau scientifique élevé disparaîtra avec moi.


Dans votre livre, vous expliquez que suite à votre participation en 2008, à un congrès sur la MHD à Vilnius, vous vous rendez compte encore une fois, que la mise au point de nouvelles technologies pourrait bien déboucher sur la fabrication de nouvelles armes bien plus destructrices que les précédentes. Pouvez-vous nous en dire plus ?


J.P.P : C'est la suite du premier livre, paru en 2003 : " OVNI et armes secrètes américaines " (Albin Michel). Le processus se poursuit et tout récemment nous avons appris que les Russes avaient obtenu le " break-even " en matière de fusion obtenue par simple compression MHD (sans le recours à la fission pour initialiser cette fusion). Les grandes puissances, puis tous les pays du monde se doteront de cette nouvelle arme, cette technologie étant " proliférante " et ne nécessitant pas d'acquérir des matériaux fissiles (U235, Pu 239). La MHD est une activité 100 % militaire, et fonctionne hélas selon le principe " les bombes d'abord, l'énergie ensuite ", alors que la fusion aneutronique permettrait d'inonder tous les pays d'énergie électrique, sans pollution ni déchets radioactifs, le produit de la réaction n'étant pas constitué que par trois atomes d'hélium.

Il est possible que ce nouveau " progrès " en matière d'armements nous soit fatal, ces bombes " à fusion pure " étant minuaturisables et pouvant éventuellement, avec une fusion Bore Hydrogène devenir... non polluantes, non neutrogènes. Des " bombes vertes ", en quelque sorte, respectant l'environnement ".


A votre connaissance, la France a-t-elle entrepris de rattraper son retard en matière de recherche sur la MHD ?

J.P.P : Je réponds catégoriquement non. Sensibilisée par le contenu de mon livre "Ovni et armes secrètes américaines" (2003), La DGA (Délégation Générale de l'Armement), a bien arrosé de crédits une quarantaine de labos civils français, mais ceux-ci n'ayant ni les connaissances requises, et encore moins des idées n'ont strictement rien produit. Les maîtres de la MHD au niveau mondial ont toujours été, depuis Sakharov, les Russes, et le restent, le démontrent.


Concernant maintenant les lettres Ummites, est-ce que vous pouvez nous donner votre position aujourd'hui en 2009 sur ce dossier ?

J.P.P : C'est un dossier d'une richesse phénoménale, comme je le démontre dans mon dernier livre, en montrant ce que j'ai pu tirer de peu de mots d'une lettre que j'avais reçue en 1993. Il est entre les mains de gens très médiocres (le site UMMO SCIENCE), qui ont réussi une OPA complète sur l'ensemble de ce dossier. Il y a une dizaine d'années. En dehors d'une mise à disposition des textes, le site n'offre aucun intérêt. En Espagne, Hiltrud Franz est pratiquement la dernière survivante du groupe des contactés. Tous les autres sont décédés, dont les plus importants : Antonio Ribera et Rafael Farriols. Quand j'aurai disparu, personne ne saura plus tirer quoi que soit de ces documents, inexploitables par quelqu'un qui ne possède pas des connaissances très pointues.


Dans votre ouvrage, vous expliquez que la société humaine est en pleine mutation, qu'elle semble aujourd'hui plus proche du précipice que d'un carrefour, qu'est-ce que le phénomène OVNI apportera à cette " marmite en ébullition " qu'est devenue notre planète ?

J.P.P : Le choix reste entre les mains des humains. L'émergence des bombes à fusion pure, de manipulations aussi monstrueuses que le 11 septembre, la montée de la violence et des déséquilibres de tous ordres partout, fait que l'histoire humaine ressemble plus à une course à l'abîme qu'une montée vers une prise de conscience essentielle. Le fait que le message mis dans mon livre ne soit pas entendu est extrêmement inquiétant. L'humanité semble courir vers le précipice avec de la cire dans les oreilles et sur les yeux.

Pouvez-vous nous dire quels seront vos prochains projets en matière de recherche scientifique et éditoriaux ?

J.P.P : Le groupe UFO SCIENCE se résume à cinq individus. Ce groupe minuscule a produit de nombreux fruits. Nous allons à la rentrée mettre en fabrication des " bonnettes à réseau ", en Chine, et les diffuser le plus largement possible. Jean-Christophe Doré achève un " détecteur d'OVNI " sophistiqué et astucieux . Je ne pense hélas pas pouvoir me rendre en octobre au colloque de Brème, Allemagne, sur le vol hypersonique, pour raison de santé. Mais nous présenterons une communication à cette manifestation, qui fera figure de nouvelle publication scientifique de haut niveau et contiendra un résultat expérimental de haut niveau. A l'opposé, le GEIPAN est une terre totalement stérile. En 32 ans, il n'est jamais rien sorti de ce service du CNES et je pense qu'il n'en sortira jamais rien, faute de compétences et d'idées. C'est ... comme ça.
Pendant trente deux ans, nous avons cru nous heurter à un mur de silence et qu'en haut lieu des gens en savaient beaucoup plus qu'ils ne voulaient bien le dire. A la suite d'un long échange que j'ai eu avec Sillard, ancien directeur de la DGA, retraité, créateur du GEPAN en 1977, quand il était président du Cnes (Hubert Curien, futur ministre de la recherche en étant le directeur) j'ai réalisé avec stupeur que nous nous étions en fait heurté à un mur de totale incompétence. Aucune recherche n'a jamais été menée en France, sur le sujet ovni, y compris dans un cadre militaire. Le ton du rapport Cometa est en fait un "baroud d'honneur" de quelques officiers supérieurs, en général témoins d'ovnis, comme le général Letty, qui tentèrent ainsi de lutter contre l'immobilisme ambiant. Comme Bounias, ils subirent les réactions négatives de leur hiérarchie. Ainsi Gilles Pinon, contre-Amiral, récemment décédé, avait interrogé le chef d'état major de la Marine, peu après la publication de ce manifeste. La réaction de ce dernier :
- Ces hommes déshonorent l'Armée !
Nous avons animé sur la chaîne Direct 8 ce qu'on pourrait considérer comme la première émission vraiment sérieuse et riche sur le sujet ovni, avec des témoignages en béton, des discours intelligents, émanant de gens réfléchis et compétents. Le public a nettement fait la différence avec les clowneries mensongères précédentes, comme l'émission C dans l'air, où Alain Cirou, rédacteur en chef de Ciel et Espace, avait déclaré, sous le regard approbateur de Jacques Patenet " qu'en matière d'ovni les scientifiques n'avaient rien à se mettre sous la dent ". Y aura-t-il une autre émission sur la chaîne Direct8 ? Je l'ignore. Mais d'ores et déjà nous avons tout le nécessaire pour la rendre aussi passionnante que la précédente, où il n'y a eu aucune censure. La chaîne avait même concédé une rallonge de dix minutes à cette émission, au montage.

Le sujet ovni se ramène à une simple bataille médiatique. L'émission de Direct8 a mis le CNES en fâcheuse posture. Les scientifiques fuient ce sujet ce sujet comme la peste. Ceux qui suivent mon site ont pu être témoins de la lamentable déroute du " Zététicien " Henri Broch.

Cinq individus, c'est bien peu. Mais le public nous a considérablement appuyés financièrement, au point que dès le début 2009 nous avons dû refuser les dons et les envois de cotisations à notre association UFO-science.. Dans cette recherche ce sont les hommes compétents qui manquent, avec des compétences techniques bien définies. Les " bras " et les bonnes volontés ne suffisent hélas pas. Le monde de la science et de la technique, quant à lui, est resté parfaitement sourd à nos appels.

Nous sommes cinq mouches s'agitant dans un verre de lait.
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Interview faite par Internet en Août 2009
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11 août 2009

OVNI : ROSWELL - RETOUR SUR L'IMPOSTURE DES BALLONS MOGUL par GILDAS BOURDAIS

Ayant déjà exposé longuement (trop longuement, m’ont dit certains) dans plusieurs livres et articles le dossier des « trains de ballons Mogul », mis en avant en 1994-95 par l’armée de l’Air américaine pour expliquer Roswell, mais réfuté ensuite par de nombreux arguments convaincants, je croyais pouvoir le laisser « reposer en paix », mais il s’avère que certains sceptiques le défendent encore, et même avec virulence. Aussi, je crois utile de récapituler ici, brièvement, les principaux arguments conduisant à écarter cette thèse des ballons qui, à y regarder de près, est une véritable imposture.

Résumé du débat.

Le 8 juillet 1947, alors que se déroulait la première vague d’observation de « soucoupes volantes » aux Etats-Unis, la base des bombardiers atomiques de Roswell, au Nouveau-Mexique, annonça par un communiqué de presse la découverte de l’un de ces mystérieux « disques volants », accidenté dans la région, sur le ranch du fermier William « Mac » Brazel. Mais, le soir même, la nouvelle était démentie par le général Ramey, commandant la région aérienne à Fort Worth, au Texas, en montrant aux journalistes des débris de ballon météo et de sa cible radar. C’était une simple méprise, expliqua-t-il, et l’incident fut aussitôt oublié.

Les débris de ballon et de cible radar montrés par le général Ramey à Fort Worth

Cependant, au début des années 1990, des témoignages ayant fait surface, de plus en plus nombreux, qui confirmaient le premier communiqué de presse de 1947, l’armée de l’Air a alors expliqué, en 1994-95, qu’elle avait en fait protégé le secret d’un « train de ballons » expérimental, appelé « Mogul », qui devait servir à détecter les futures explosions nucléaires soviétiques. C’était cela que les militaires de Roswell avaient pris pour une soucoupe ! Cette nouvelle explication est-elle plus crédible que la première ?
Rappelons d’abord que l’enquête de la commission du Congrès américain, le GAO, a refusé l’explication des ballons dans son rapport de juillet 1995, contrairement à ce qu’a écrit en France le sociologue Pierre Lagrange. Le GAO, ayant constaté la destruction non motivée d’une grande partie des archives de la base de Roswell, a seulement conclu : « L’enquête sur ce qui s’est écrasé à Roswell continue ». Les enquêtes ont continué, en effet. Au terme d’un long débat qui s’est déroulé au cours des années suivantes, les arguments se sont accumulés qui permettent d’affirmer que l’explication de l’Air Force ne vaut rien. J’ai participé activement à ces débats, et j’ai présenté les arguments en détail dans plusieurs livres et articles, auxquels je renvoie le lecteur désireux d’en savoir plus (1). Je ne fais ici que les résumer.
Voici, selon moi, les principaux arguments que l’on peut avancer contre Mogul :

- Les trains de ballons « Mogul », lancés depuis la base de White Sands, étaient composés d’éléments très ordinaires, ne pouvant nullement impressionner les officiers d’élite chargés des bombardiers atomiques ;

- Le train de ballons « Mogul » No 4, le seul censé pouvoir expliquer – selon les militaires - certains débris bizarres décrits par les témoins, n’avait même pas décollé, ayant été annulé à cause du temps couvert ! On peut en trouver les preuves dans le gros dossier d’un millier de pages, le Roswell Report , publié en 1995 par le Pentagone (2). De plus, aucun témoin de l’époque n’a décrit la récupération d’un train de ballons Mogul, avec ses équipements, sur le ranch du fermier Brazel ou dans les environs ;

- Des témoins militaires et civils, crédibles pour la plupart, ayant eu l’occasion de voir de près et de manipuler certains débris trouvés au sol sur les lieux du crash, ont décrit, de manière concordante, des débris étranges, très différents des débris ordinaires de ballons météo et de cibles radar ;

- Enfin, de nombreux témoins, retrouvés peu à peu par plusieurs équipes d’enquêteurs, racontent une tout autre histoire, celle de la découverte, encore très secrète aujourd’hui, non seulement d’un champ de débris étranges sur le ranch Foster du fermier Brazel, mais aussi d’un ovni accidenté et de plusieurs cadavres d’êtres non humains, sur un site plus proche de Roswell. Sur ce quatrième point, je renvoie le lecteur aux autres articles sur ce blog, en particulier à : « Le crash de Roswell – Le nouveau scénario »

Reprenons ici les trois premiers arguments, qui suffisent, à eux seuls, pour réfuter Mogul.

1- Les trains de ballons « Mogul » : du matériel très banal

Le remplacement de l'explication initiale de l'Air Force - un ballon météo et sa cible radar - par cette nouvelle explication - un train de ballons météo « Mogul » avec divers équipements - appelle tout de suite une remarque de bon sens : vingt ou trente ballons, ce sont toujours des ballons ! Pour tenter de faire oublier cette lapalissade, les tenants de Mogul se sont efforcés de rendre ces trains de ballons impressionnants et mystérieux. Karl Pflock, l’un des premiers enquêteurs à lancer l’hypothèse Mogul, en même temps que l’Air Force au printemps 1994, décrit ainsi ces trains de ballons, dans son livre principal sur le sujet, paru en 2001 (3) : Ils étaient "énormes et complexes, s'étendant sur près de 700 pieds en vol, de haut en bas" (en fait, 600 à 650 pieds, soit 200 à 220 m). L’armée de l’Air américaine a publié l’année suivante son Roswell Report, dans lequel elle insiste également sur cette grande taille, avec un dessin comparant le train de ballons Mogul à la Tour Eiffel ! Cette comparaison est trompeuse. On trouve dans le Roswell Report de l’Air Force plusieurs schémas de trains de ballons, notamment des numéros 2 et 5, mais pas de Mogul 4 dont, apparemment, ils n’ont aucune trace dans les archives (on va voir pourquoi). Voici le schéma du train numéro 2, lancé sur la côte Est le 18 avril :

Schéma du train de ballons Mogul No 2 (Roswell Report)

En fait, les données techniques du rapport indiquent que le train complet, avec instruments, ne pesait pas plus de 25 kg. Avant de gonfler les ballons, on pouvait le transporter dans une jeep. La vraie question est celle-ci : à partir de combien de ballons météo, accrochées à une ligne, risque-t-on de les prendre pour une soucoupe volante ? Mais voyons de plus près les autres composants.

Lancer de ballons et cibles radar reconstitué pour une émission de télévision

Le train Mogul numéro 2, lancé en Pennsylvanie, avait servi de modèle pour les lancers prévus à White Sands, début juin 1947. Il comprenait 25 petits ballons météo en néoprène, pesant chacun 350 grammes, attachés à une ligne verticale en nylon de 650 pieds (200 m), et des cibles radar. Les ballons étaient distants de 20 pieds (6 m). L'ensemble était surmonté par trois ballons en néoprène de 1 000 grammes, qui servaient à assurer le décollage rapide et qui devaient être lâchés à partir de 45 000 pieds (13 700 m). Pour essayer de prolonger la durée des vols, les ingénieurs avaient eu l'idée d'accrocher un réservoir de ballast destiné à s'écouler lentement. C'était un réservoir rempli de kérosène, ou de sable, en plastique, avec une valve de relâchement automatique en fonction de la pression atmosphérique. Selon les modèles, il emportait environ de trois à cinq kilos de ballast. Pour alimenter ce matériel, il y avait aussi une batterie électrique. On a fait grand cas d'une autre pièce d'équipement, la "bouée acoustique" (sonobuoy), destinée à la détection des explosions à distance, qui aurait pu intriguer, dit-on, les aviateurs de Roswell. C'était un modèle marin comportant un hydrophone, un émetteur et sans doute une petite batterie électrique, d’un poids total de treize livres (6,9 kg). Mais la photographie de l'appareil montre un vulgaire tube métallique, long d'un mètre environ, cerclé ici et là, avec au sommet une petite sangle et une boucle métallique, bref, un matériel très ordinaire. Pas la moindre science-fiction là dedans.


Bouée acoustique (Roswell Report)

Un modèle de réservoir de ballast (Roswell Report)


Ces équipements sont décrits, avec schémas, photographies, fiches techniques détaillées, dans le volumineux Roswell Report. Cette abondante documentation est destinée, évidemment, à impressionner et à décourager la lecture. Mais si l'on ne perd pas son bon sens en route, il est flagrant que les composants de ces trains de ballons étaient des équipements parfaitement ordinaires, qu'on n'aurait pu manquer d'identifier comme tels. Il aurait suffi à quiconque d'identifier l'un quelconque de ces matériels - un ballon, une baguette de balsa des cibles radar (nous y venons tout de suite), une batterie, de la ficelle en nylon, une boucle métallique - pour régler la question. Seul l’objectif du projet, mettre au point un système de détection des futures explosions atomiques soviétiques, était secret. Même les personnels techniques n’en savaient rien.

Fragiles cibles radar

Le train de ballons numéro 2 était équipé de trois cibles radar, du modèle ML-307B, très légères et fragiles, d'un poids de 100 grammes seulement, ressemblant à des cerfs volants en forme de tétraèdre, avec des feuilles d'aluminium collées sur papier et montées sur des baguettes de balsa de 8 mm (5/16 de pouce) de section.

Le professeur Charles Moore montrant une cible radar

Des aviateurs chevronnés, responsables des bombardiers atomiques, pouvaient-ils prendre ces fragiles cerfs volants pour des débris de soucoupe volante extraterrestre ? Pour répondre à cette question, il n'en coûte qu'un Euro, le prix d'une baguette de balsa de 8 mm de section, achetée dans n'importe quel magasin de fournitures artistiques et de bricolage. Faites l'expérience, et voyez vous-même combien il est facile de casser une telle baguette dans ses mains. C'est vraiment très fragile. De même, amusez-vous à coller une feuille d'aluminium sur une feuille de papier, et voyez comme c'est facile à déchirer. Voyez également comme c'est facile à froisser, et pratiquement impossible à défroisser ensuite (contrairement aux feuilles infroissables décrites par des témoins, comme on va voir plus loin). Les deux officiers de Roswell envoyés sur le terrain, le lundi 7 juillet, pour inspecter le champ de débris, étaient parfaitement capables d’identifier ces débris. La commandant Jesse Marcel était le responsable de la sécurité de la base de Roswell, et le capitaine Sheridan Cavitt était responsable du contre-espionnage. L’année précédente, Marcel avait été félicité par toute la hiérarchie pour son excellent travail comme responsable de la sécurité des expérimentions atomiques à Bikini. Petit détail : son fils, le Dr Jesse Marcel Jr, a défendu sa mémoire contre des attaques assez ignobles des sceptiques, dans son livre The Roswell Legacy (2007). Il y a reproduit son diplôme de « radar intelligence officer » obtenu en 1945. Marcel n’ignorait rien des cibles radar !

Diplôme du commandant Marcel, pour « radar intelligence officers »

L’argument de la colle à bois

Mentionnons un curieux argument des sceptiques, comme Karl Pflock et le professeur Charles Moore, le physicien qui avait participé aux lancements à l’époque et qui était devenu dans les années 90 un ardent défenseur de la théorie Mogul, avec son livre UFO Crash at Roswell, paru en 1997 (4). Ils ont estimé que ces baguettes de balsa avaient été rendues peu reconnaissables car elles avaient été renforcées, non seulement avec du ruban adhésif, mais en les imprégnant de colle à bois. L'ingénieur Robert Galganski a fait une étude complète de la résistance des ces baguettes de balsa, y compris en les traitant de la sorte. Le résultat est sans appel : elles cassent presque aussi facilement (5). Pour ceux qui aiment les chiffres, les mesures faites dans les règles de l'art avec du matériel adéquat, ont donné les résultats suivants. La force à appliquer pour rompre ces baguettes de 8 mm est de 7,4 newtons pour une baguette non traitée, et de 17,4 newtons pour une baguette traitée avec de la colle à la caséine. Ce sont des forces faibles : un newton équivaut à 0,225 livre, ou 100 grammes.J'ai vérifié moi même qu'une baguette imprégnée de colle, bien séchée, est aussi facile à briser, et que le bois reste parfaitement identifiable car la colle s'enfonce dans le bois après séchage. Galganski a aussi fait des essais de combustion. Les baguettes, traitées ou non avec de la colle, ont commencé à brûler après une exposition de vingt secondes à la flamme d'un briquet. Or, rappelons-nous que le commandant Jesse Marcel, qui avait inspecté le terrain le 7 juillet ainsi que le rancher Brazel qui avait découvert le champ de débris, avaient essayé vainement de brûler les débris avec leur briquet. On le voit, l'argument de la colle à bois est une plaisanterie.
Nous pouvons déjà faire un premier constat. Si les aviateurs de Roswell avaient trouvé un tel matériel, il leur aurait suffi de ramasser l'une de ces baguettes et de la casser pour voir à quoi ils avaient affaire. Il n'y aurait pas eu de communiqué de presse, et pas d'affaire de Roswell. Il est invraisemblable que les aviateurs chevronnés de Roswell, triés sur le volet pour être responsables des bombardiers atomiques, aient pu prendre ces matériels d'une grande banalité pour des débris de soucoupe volante.

L’argument du « scotch à fleurs »

Cependant, nous ne sommes pas au bout de nos peines car les partisans de Mogul ont mis en avant les fameuses cibles radar, une pièce dont ils ont fait toute une histoire, pour la raison que celles de l'équipe de la New York University (NYU), chargée des essais, avaient une particularité : elles étaient renforcées avec du ruban adhésif décoré de motifs de fleurs stylisées. C’est cela, explique-t-on sans rire, que des témoins, tel le commandant Jesse Marcel, le responsable de la sécurité de la base de Roswell qui avait passé une journée à inspecter le terrain (et sur lequel sceptiques se sont acharnés), avaient pris pour des « hiéroglyphes » extraterrestres !
Reconnaissons-le et n’esquivons pas cette difficulté : Le fermier Mac Brazel et sa fille Bessie Brazel-Schrieber ont bel et bien décrit, le premier lors de son entretien du 8 juillet 1947 (sous escorte militaire), et sa fille dans sa déclaration sous serment du 22 septembre 1993, des débris de ballons, et très probablement de cibles radar, comme celles qui étaient lancées début juin à Alamogordo, avec ce détail révélateur du "scotch à fleurs", selon Brazel. L'article du Roswell Daily Record du 9 juillet cite Brazel : "une grande quantité de ruban adhésif scotch et une certaine quantité de ruban avec des fleurs imprimées dessus avaient été utilisées dans la construction" (Considerable scotch tape and some tape with flowers printed upon it had been used in the construction).
Ce n'est pas parfaitement clair, mais il faut admettre que Brazel avait bien fait mention de ruban adhésif avec des dessins de fleurs. A moins de supposer qu’il débordait d'imagination, il a bien cité là un détail "qui ne s'invente pas", et qui semble être, à première vue, un point en faveur de la découverte d'un train de ballons NYU. Soulignons cependant que c'est le 14 juin, alors que le communiqué de presse du 8 juillet parlait d’une découverte la semaine précédente. Je cite : « L’objet volant a atterri sur un ranch près de Roswell la semaine dernière ». Qu'avait donc trouvé Brazel, le 14 juin, c'est-à-dire au moins quinze jours pus tôt ? Le train de ballons Mogul numéro 4 ? Une hypothèse bien plus probable est celle de la découverte d'une simple grappe de quelques ballons météorologiques avec plusieurs cibles radar, qui ne l’avait d’ailleurs pas ému le moins du monde : on en trouvait assez souvent dans la région et ce n’était pas pour cela qu’il avait fait le voyage à Roswell le 6 juillet.
Le gros Roswell Report de l'Air Force mentionne clairement des lancements de grappes de ballons météorologiques par l'équipe de la New York University, au cours du mois de juin. Les rapports de NYU y sont reproduits et, dans celui couvrant le mois de juin 1947, on lit :
"Des essais sur le terrain ont été effectués sur la base aérienne militaire d'Alamogordo pendant la semaine du 1er juin, en utilisant des grappes (clusters) de ballons météorologiques. L'objectif premier de ces essais était de perfectionner le maniement et les techniques de lancement pour de grands assemblages, et de vérifier la mise en œuvre des dispositifs de contrôle de l'altitude mis au point pour ce projet".

Schéma d'une grappe de ballons de NYU (Roswell Report)

Karl Pflock donne plus de détails sur ces lancements non répertoriés, dans son deuxième livre sur Roswell, paru en 2001. A côté des "vols de service" avec tout l'équipement prévu pour les essais de type "Mogul", l'équipe de NYU effectuait aussi des lancements météorologiques, pour vérifier les vents avant les lancements de grands trains de ballons Mogul. Ces vols, précise Pflock, étaient des assemblages en grappe de trois à sept ballons en néoprène transportant de trois à cinq cibles radar ML-307B, attachées les unes aux autres comme la queue d'un grand cerf-volant. Le physicien Charles Moore utilisait plusieurs cibles car le signal de retour radar était trop faible avec une seule cible. Où ces grappes de ballons étaient-elles retombées ? On ne le sait pas. Ainsi, la question de savoir ce qu'avait trouvé Brazel, selon ses dires, le 14 juin, est bien plus incertaine que ne le disent les tenants du train de ballons Mogul N° 4.

Aucun témoin n’a décrit la découverte d’un train de ballons Mogul

Un point important est à signaler ici : aucun témoin de Roswell n’a décrit la découverte, sur le ranch Foster du fermier Brazel, d’un train de ballons Mogul complet, avec ses équipements. Ni le fermier, ni sa fille Bessie, et pas davantage Marcel et son collègue, le capitaine Sheridan Cavitt qui avait inspecté avec lui le terrain, n'ont décrit les constituants des trains de ballons Mogul. Non seulement les instruments tels que radiosonde, bouée acoustique, batterie et réservoirs de ballast (nous allons y revenir) mais pas même la longue cordelette en nylon, à laquelle étaient accrochés les ballons, cibles radar et instruments.

Le physicien Charles Moore, qui avait fait partie de l’équipe de NYU, le reconnaît lui-même dans son livre de 1997, UFO Crash at Roswell, et propose une explication embarrassée :
"Apparemment, une grande partie de l'équipement transporté dans ce vol n'a pas été retrouvée. Brazel n'a pas dit avoir découvert de commutateur de pression, de microphone du type bouée acoustique (sonobuoy), ou le filin en nylon de 600 pieds auquel étaient attachés les ballons. Je soupçonne que les ballons restant (en état) dans le train ont décollé de nouveau et sont partis vers le nord-est, après que les cibles radar, les fragments de ballons déjà éclatés et les anneaux d'aluminium en bas du train aient été détachés par les vents de surface qui soufflaient sur le train après son premier contact avec le sol. Quoi qu'il en soit, aucune découverte des parties supérieures du train de ballons N° 4 n'a jamais été signalée".
De fait, rien de tout cela n’a été retrouvé dans les environs, et il n’y a donc pas la moindre preuve à l’appui de cette hypothèse.

Il y a un témoin qui avait tout vu : le capitaine Sheridan Cavitt, du service de contre-espionnage, qui avait accompagné le Major Marcel sur le terrain. Voilà l'homme qui est en position de trancher ce débat. Il est présenté dans le Roswell Report de l'Air Force comme témoin en faveur de l'hypothèse Mogul. Or, il n'en est rien. Cavitt indique assez clairement, dans son long entretien avec le colonel Weaver, qu'il n'a pas vu de train de ballons. Il n'a vu qu'un ballon météo et sa cible radar. Et, questionné par Weaver sur Karl Pflock, il s'offre le luxe de le qualifier de "notre meilleur debunker" ! Ce mot anglais est dérivé du verbe to debunk qui signifie démystifier, briser. Le debunker est donc le démystificateur, le briseur de mythes, mot très utilisé en ufologie. Drôle de témoin en faveur de Mogul, qui a passé la journée sur le terrain et n’a pas vu Mogul. Peut-être s’est-il refusé à s’associer à un nouveau mensonge, plus gros encore que le premier.
De son côté, Brazel dit, dans son entretien publié par le Roswell Daily Record du 9 juillet, que ce qu'il avait ramassé devait peser dans les cinq livres. C'est loin du compte pour un train de ballons Mogul, même délabré, comme le concède le professeur Charles Moore dans son livre. Le train numéro 5 pesait environ 25 kg, c'est à dire dix fois plus. Cette difficulté n'a pas échappé à Moore, qui a tenté de l'expliquer de la manière suivante :
« Brazel a déclaré avoir ramassé une quantité de caoutchouc "qui faisait un tas d'environ 18 à 20 pouces de long et 8 pouces d'épaisseur" (46 à 51 cm de long, 20 cm d'épaisseur). Trois à quatre ballons météo de 350 grammes auraient fourni une telle quantité de caoutchouc. Cependant, lorsqu'un ballon acoustique (de 350 grammes) éclate, tout ce qui revient sur terre avec sa charge utile (par exemple une radiosonde) est le col du ballon ».
Tout cela suggère, pour Moore, que Brazel avait trouvé le 14 juin des débris provenant d'une grappe de ballons qui aurait été quelque peu démembrée à l'atterrissage. Il note ensuite que, pour arriver à un poids de cinq livres, en comptant non seulement le caoutchouc des ballons mais aussi les autres éléments constituant un train de ballons, "il aurait suffi d'environ quatre ou cinq combinaisons de ballons et cibles".
Cela correspondrait bien à la découverte d'une petite grappe de ballons, et non pas d'un grand train de 25 à 30 ballons accrochés à une ligne de 200 mètres avec divers instruments. On voit que Moore se prend lui-même les pieds dans ses explications. Mais alors, où donc était passé le grand train de ballons Mogul 4 ? Nous allons voir maintenant que le débat est bien plus simple, car il n’avait même pas décollé.

2- Le train de ballons Mogul numéro 4 avait été annulé !

A part le témoignage de Brazel, et celui de sa fille, le seul document écrit qu'on a retrouvé pour tenter d'étayer l'hypothèse du vol Mogul N° 4 est le journal personnel du géophysicien Albert Crary, responsable des lancements de ballons à White Sands, fourni par sa veuve au professeur Charles Moore en 1994. Il est reproduit intégralement, pour cette période, dans le volumineux Roswell Report de l'armée de l'Air, et Charles Moore s'y est référé pour tenter de prouver que le vol Mogul Numéro 4 avait bien décollé. Or, Crary ne le dit pas du tout ! En voici les brèves phrases significatives qui indiquent tout le contraire :

"Mardi 3 juin. Debout à 2 h 30 du matin, prêt pour lancer de ballons, mais finalement abandonné à cause du ciel couvert.

Mercredi 4 juin. Dehors dans la montagne de Tularosa (au nord-ouest) et explosé charges de minuit à 6 h du matin. De nouveau, pas de vol de ballons à cause des nuages. Ai fait voler une bouée acoustique ordinaire (regular sonobuoy) avec une grappe (cluster) de ballons et j'ai eu de la chance avec le récepteur. Dehors avec Thompson l'après-midi au sol, mais médiocre par avion. Nous avons tiré des charges de 18 h à 24 h.

En revanche, Crary mentionne ensuite en ces termes le premier lancement réussi du train de ballons No 5, dans la nuit du 5 juin :
« Assemblage complet de ballons à altitude constante lancé à 5 h » ( Whole assembly of constant-altitude balloons set up at 0500 ). On voit bien la différence de rédaction : le lancement d’une grappe avec une bouée acoustique, dans la matinée du 4 juin, n’était pas du tout un train de ballons Mogul. Pour être précis, la bouée acoustique en question pesait 6,9 kg. Les ballons en néoprène, selon les données du Roswell Report, pouvaient enlever une « charge utile » de deux fois et demi leur poids. Un ballon de 1 000 grammes (un lifter) pouvait ainsi enlever 2,5 kg, et il suffisait de quatre ballons de cette taille, tout au plus, pour enlever la bouée acoustique.

Ainsi, si l'on s'en tient à la lettre du journal de Crary, le train de ballons numéro 4 n'a pas été lancé. Charles Moore et Karl Pflock reconnaissent chacun que ce journal est curieux (puzzling), contradictoire, même, admet Moore. Et il fait ce commentaire : "Une interprétation de la note du 4 juin est que le lancement prévu pour faire des mesures en vol des explosions de surface de Crary après minuit fut annulé à cause des nuages, mais que, quand le ciel s'éclaircit plus tard, la grappe (cluster) de ballons déjà gonflés fut relâchée". Moore explique que le mot grappe était utilisé aussi bien pour décrire un train de ballons qu'une simple grappe, comme ceux du projet Mogul. Détail important : Il avoue ne pas se souvenir de ce lancement de ballons. Mais il suppose qu'il devait être semblable, comme prévu, au train du vol N° 2 qui devait leur servir de modèle pour les trois premiers vols à White Sands. Il est donc probable, conclut Moore, que Crary ait bien fait un tel lancement. Et il suppose en plus que ce lancement aurait eu lieu à trois heures du matin, une hypothèse dont il a absolument besoin pour élaborer une trajectoire hypothétique jusqu'au ranch de Brazel. En fait, on le voit bien, cela ne correspond pas du tout à la rédaction de Crary : si on le lit correctement, le vol Mogul 4 n'a pas eu lieu.
Le seul fait que Moore avoue ne pas se rappeler du lancement de Mogul 4 est extrêmement révélateur. Voilà un jeune étudiant en physique, à qui on a confié un poste de responsabilité, prêt à entrer en action pour procéder au lancement d'un projet important, qui ne se souvient pas du premier lancement, à trois heures du matin !

Le Rapport technique No 1 de NYU (New York University), du 1er avril 1948, couvrant la période du 1er novembre 1946 au 1er janvier 1948, ne fait que confirmer tout cela. Commentaire dans le tableau complet des lancements :
« Vol No 5 lancé le 5 juin, composé de 26 petits ballons météo de 350 grammes et 3 ballons plus grands au sommet (lifters), d’une radiosonde et d’un réservoir de ballast liquide. Poids total 26 kg. Atterri à l’est de Roswell. Commentaire de NYU : Premier vol réussi en emportant une charge lourde. » Remarquons qu’ils avaient déjà renoncé aux cibles radar, beaucoup trop fragiles.

Extrait du tableau complet des vols Mogul selon la New York University

Voilà qui est clair : le vol No 5 fut le premier lancement réussi d’un train de ballons complet, avec instruments. Donc, pas de train Mogul 4, qui ne figure pas dans le tableau. Les sceptiques ont soutenu (certains le font encore) qu’il y avait bien eu des lancements, à White Sands, avant Mogul 5, et que ce commentaire du rapport ne prouve rien. Qu’en est-il de ces supposés vols précédents ?

Dans le Rapport de NYU du 30 avril 1947, sur les ballons à « niveau constant » (constant level), sont décrits les vols qui furent lancés sur la côte Est (pages 26, 27) :
Le vol du 3 avril 1947 correspond au numéro 1 du tableau récapitulatif des vols. C’est le premier essai de lancement Mogul complet, et c’est un échec. Le vol suivant était prévu le 18 avril, mais est abandonné à cause du vent. Les ballons déjà gonflés sont lâchés et l’équipement est récupéré. Un nouvel essai est prévu pour le 8 mai, mais le rapport du 30 avril s’arrête là. On retrouve bien un lancement cité à la date du 8 mai dans le journal d’Albert Crary, mais c’est encore un échec à cause du vent.
Il s’agit là des vols Mogul No 2 et 3, qui sont des échecs et ne figurent même pas dans le tableau complet de NYU. C’est bien ainsi, en revanche, qu’ils sont numérotés et datés dans le livre de Charles Moore (tableau, pages 78 et 79, et texte, page 80).

Extrait du tableau complet des vols selon le professeur Charles Moore. Il a rajouté les vols ratés No 2 et 3, ce qui lui permet de rajouter aussi le vol annulé No 4 !

Moore a rajouté dans son tableau les vols ratés 2 et 3, ce qui lui permet, dans la foulée, d’y ajouter le précieux vol Mogul 4, qui avait été annulé ! Pour sa part, l’armée de l’Air a mis en avant, dans son premier rapport de 1994, un lancer de ballons le 29 mai qui aurait été selon elle le vol Mogul No 3, mais c’est en contradiction flagrante, non seulement avec le rapport NYU, mais avec le livre de Charles Moore, publié trois ans plus tard. Il faut dire que Moore était l’un des auteurs du rapport NYU ! Albert Crary mentionne juste, dans son journal, le lancement d’un simple ballon pour cette date. Charles Moore explique dans son livre (page 82) que ce lancement du 29 mai n’était qu’un premier essai sans équipements, lesquels n’étaient pas encore arrivés à White Sands à cette date. Ainsi, Moore n’a pas suivi l’armée de l’Air sur ce point.

Il faut mentionner ici que le professeur Charles Moore s’est livré, dans son livre, à des calculs compliquée pour tenter de faire atterrir son mythique train de ballons Mogul 4 sur le champ de débris du ranch de Brazel. Mais d’autres chercheurs, tels Kevin Randle, Brad Sparks et David Rudiak, y ont trouvé des erreurs, notamment des manipulations des données météo, qui ont disqualifié cette tentative. Le lecteur curieux d’en savoir plus peut visiter le site web de David Rudiak (6).

3- Les vrais débris : étranges, ne ressemblant à rien de connu

Plusieurs témoins ont confirmé la découverte, par le fermier Brazel et le Major Marcel, d’un grand champ où étaient éparpillés d’étranges débris, à environ cent km au nord de Roswell, à vol d’oiseau. Ceux-ci comprenaient un grand nombre de petites pièces métalliques, découpées irrégulièrement mais très solides, rigides et légères. Il y avait aussi beaucoup de morceaux de feuilles métalliques, ressemblant à de l’aluminium mais qu’on ne pouvait ni couper, ni déchirer, et possédant une « mémoire de forme » (on pouvait les froisser mais elles reprenaient ensuite leur forme plate, sans garder aucun pli). Certaines pièces étaient poreuses, et ne pouvaient donc provenir d’une enveloppe de ballon. Certains débris ressemblaient à des baguettes de balsa, mais on ne pouvait ni les casser, ni les brûler. Selon le Dr Jesse Marcel, fils du commandant Marcel, à qui son père avait montré brièvement des débris, il y avait de curieuses inscriptions le long d’une baguette, faisant penser à des « hiéroglyphes ». D’autres pièces ressemblaient à des fibres optiques.

Tout cela suggérait qu’il y avait eu une violente explosion au dessus de terrain. Incidemment, lorsque j’avais rencontré Karl Pflock en 1995, je lui en avais fait la remarque, notant que des ballons gonflés à l’hélium ne peuvent pas exploser, et il avait fini par l’admettre avec réticence, mais il a continué ensuite à affirmer que c’étaient des débris d’un train de ballon Mogul… C’est une bonne illustration de la plaisanterie de Stanton Friedman au sujet des sceptiques qui ne veulent rien entendre : « Ne m’embêtez pas avec les données, mon opinion est faite ! »

Le dossier des témoignages sur les débris est trop gros pour être détaillé ici. Je renvoie le lecteur à mon livre Le crash de Roswell. Enquête inédite, dans lequel un chapitre entier leur est consacré. Citons juste les principaux types de matériaux:

1- des feuilles métalliques minces, pliables mais infroissables, qu'on ne pouvait ni couper ni brûler ;
2 - des pièces métalliques rigides, très nombreuses, qu’on ne pouvait ni plier, ni brûler ;
3- des morceaux minces et très solides ressemblant à du « parchemin » ;
4 - des morceaux ressemblant à de la bakélite ;
5 - des filaments transparents comme des fils de pêche en nylon ;
6 - des petites poutrelles avec des « hiéroglyphes ».

Arrêtons-nous juste sur ces fameux « hiéroglyphes ». Selon le Dr Jesse Marcel Jr, voici à quoi ressemblaient ces symboles étranges, qui ont donné tant mal à l’armée de l’Air et aux sceptiques pour les expliquer comme une confusion avec les dessins de fleurs sur le ruban adhésif renforçant les cibles radar.

Dessin des symboles par le Dr Jesse Marcel Jr

A ce propos, Charles Moore, à qui le scrupuleux Dr Marcel avait rendu visite à Socorro, a essayé de le convaincre qu’il avait vu des débris de cible radar, en lui montrant une cible qu’il avait conservée chez lui. Marcel a raconté que la discussion avait été courtoise mais brève. « Non, ce n’est pas ce que j’avais vu », lui dit-il. « Si, c’est cela que vous aviez vu ! ». Moore savait mieux que lui ! Marcel lui redit que non, et rentra chez lui, dans le Montana.

Rappel des principaux témoins sur les débris :

Quelques témoins qui disent avoir eu en main des débris :
Major Jesse Marcel ; Dr Jesse Marcel Jr ; Ms. Sgt Lewis Rickett ; Sgt. Robert Smith ; Loretta Proctor ; Bill Brazel ; Sally Strickland Tadolini ; Walter Haut ; Sgt. Homer Rowlette ; Sgt Earl Fulford.

Autres témoins sur les débris :

Barbara Dugger (petite fille du shérif Wilcox); Robert Porter ; Robert Shirkey ; Elizabeth Tulk ; Major Ellis Boldra ; Sgt Melvin Brown (selon sa fille Beverly Bean) ; Dan Dwyer (selon ses filles Frankie Rowe et Helen Cahill) ; Capt. Olivier Henderson (selon sa veuve Sapho, sa fille Mary Kathryn Groode et son ami John Kromschroeder) ; Floyd Proctor ; Lyman Strickland ; Marian Strickland ; Tommy Tyree ; shérif George Wilcox (selon sa veuve Inez Wilcox) ; Mack Brazel ; caporal Raymond Van Why.

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Notes
1. Mes deux livres sur Roswell :
Roswell. Enquêtes, secret et désinformation (2004 JMG Editions)
Le crash de Roswell. Enquête inédite (2009. Editions JMG – Le Temps présent)
2. Headquarters US Air Force, The Roswell Report. Facts and Fiction in the New Mexico Desert, 1995. Diffusé par le U.S. Government Printing Office, Washington DC.
3. Karl Pflock, Roswell : Inconvenient Facts and the Will to Believe, Prometheus Books, 59 John Glenn Drive, Amherst, New York, 2001. (trad. fr. Roswell. L’ultime enquête, Terre de brume, Rennes, 2007).
4. Charles B. Moore (avec Benson Saler et Charles A. Ziegler), UFO Crash at Roswell. The Genesis of a Modern Myth, Smithsonian Institution Press, Washington, 1997.
5. Robert Galganski, The Roswell Debris Field. An Engineer's Perspective, 2eme édition, 2002, Fund for UFO Research (FUFOR), PO Box 277, Mount Rainier, MD, 20712.
6. Site web de David Rudiak

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GILDAS BOURDAIS - Août 2009
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